LA CULTURE, UN LEVIER ESSENTIEL DE COHÉSION SOCIALE EN GUINÉE
La «Caravane Culturelle pour la cohésion sociale» des Nations Unies a sillonné dix villes de la Guinée pour promouvoir la paix et le dialogue social
C'est dans le but de soutenir le dialogue national, la promotion de la paix, la cohésion sociale, la consolidation de la paix et le processus de réconciliation nationale en Guinée que l’Équipe Pays des Nations Unies (UNCT) et le Bureau du Représentant Spécial du Secrétaire Général pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) ont organisé la "Caravane Culturelle pour la cohésion sociale" avec le soutien du Département des Affaires Politiques et de la Consolidation de la Paix (DPPA).
Cette caravane conjointe du Système des Nations Unies a fait la promesse de miser sur la culture et les traditions, y compris les pactes communautaires, pour contribuer à l'amélioration du climat social et politique, dans un contexte de transition qui place les questions de paix et de dialogue social au centre des priorités nationales.
Dans cette dynamique, la caravane a été lancée à Nzérékoré par le Ministre des Affaires Étrangères, de l’Intégration Africaine et des Guinéens de l’Étranger, Dr Morissanda Kouyaté et le Représentant Spécial du Secrétaire Général pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS) M. Mahamat Saleh Annadif, en présence des partenaires techniques et financiers, des représentants des missions diplomatiques et des principaux acteurs de la société civile et leaders communautaires. De fin 2021 à décembre 2022, la caravane culturelle des Nations Unies a sillonné toutes les régions guinéennes, en offrant des plateformes innovantes d'expression et d'interaction entre les communautés, notamment dans les villes qui portent les germes de conflits et celles marquées par la présence des facteurs de paix, à Kindia, Mamou, Boffa, Dabola, Labé, Koundara, Kankan, Siguiri et Macenta, sous l'égide des agences (OIM, ONU droit de l'homme, OMS, PNUD, UNFPA) et l'appui du Bureau de la Coordination (UNRCO).
Approches d'interventions diversifiées
Dans les différentes localités d'intervention, les activités de la caravane ont permis d'identifier et d'utiliser des instruments de cohésion sociale basés sur les mécanismes endogènes de prévention des conflits :
- Des conférences de sensibilisation sur la gestion concertée et inclusive des conflits fonciers (Kindia) et en zone minière (Boffa) ;
- Des causeries éducatives dirigées par les jeunes (Mamou, Labé), pour impulser le cadre de dialogue et soutenir les concertations entre les communautés ;
- Un carnaval de la paix (Dabola, Koundara), basé sur la danse traditionnelle « Sampatche » qui symbolise le « Vivre-Ensemble » entre les communautés pour renforcer le dialogue interculturel ;
- La danse « Mamaya » déclarée patrimoine culturel national de la Guinée par les autorités depuis 2018, après plus de 70 ans d’existence, à Kankan. Elle a permis de réunir les natifs de Kankan et les citoyens d’autres localités en faisant la promotion du vivre-ensemble dans un environnement diversifié ;
- Le Dialogue « Sous le Fromager » organisé dans le cadre de la première édition du Festival sur le Milo ;
- Les dialogues intergénérationnels jeunes, femmes, hommes, et personnes âgées pour parler des conflits fonciers, des conflits générationnels, des valeurs culturelles, des décisions politiques face aux réalités sociales, culturelles et cultuelles, l’exclusion des femmes dans la prévention et la gestion des conflits, le manque d’emploi des jeunes, etc.
- Une émission radiophonique interactive pour sensibiliser sur la nécessité de renforcer le vivre-ensemble et la cohésion sociale à Kankan ;
- La sensibilisation sur la cohésion sociale dans les sites miniers (Siguiri) qui a regroupé les autorités locales, administratives, les leaders communautaires, les jeunes, les femmes et les chasseurs Donzos.
La Caravane Culturelle pour la Cohésion Sociale en Guinée, en plus de renforcer l'approche "unis dans l'action" des Nations Unies, a soutenu et inspiré positivement les acteurs de la société civile guinéenne. À Kankan, l’Association Guinée culture a organisé la première édition du Festival sur le Milo sous le signe de la paix. À Koundara, la société civile et les autorités municipales ont organisé la première édition du Festival des Arts du Badiar (du 18-au 25 décembre 2022), quelques mois après le passage de la caravane dans le Badiar. L'Union des Jeunes Leaders de Guinée (UJLEG) a planifié un projet de caravane pour la paix dans les quatre (4) régions naturelles. À N’Zérékoré, la première édition du Festival du Livre et des Auteurs (du 2- 4 décembre 2022) a été lancée sous le signe de la consolidation de la paix par le livre.
Quelques témoignages
« Il y a beaucoup d’éléments de notre culture qui nous rassemblent. Et la femme est celle qui conduit à la paix, c’est elle qui est l’artisane numéro un de la paix. Avec un seul instrument du patrimoine culturel, les gens se retrouvent, les gens se rassemblent, les gens signent pour la cohésion sociale. Il est temps qu'on revienne à la culture, en faisant confiance aux hommes et femmes de culture, aux muséologues que nous sommes, et qui se sont démarqués pour aller sur terrain et utiliser la richesse culturelle pour la consolidation de la paix et la cohésion sociale dans nos communautés. Le Système des Nations Unies, à travers cette caravane, va réussir sa mission de prévention de la paix dans nos localités » a affirmé Zeinab Koumanthio DIALLO, Co-fondatrice du Musée du Fouta Djallon de Labé.
« En tant que jeune natif de Dabola, je dirais qu’il n’y a rien de mieux que le vivre ensemble. Cela s’explique par nos diversités culturelles, car nous sommes l’avenir. Et l’avenir n’est possible que dans la cohésion sociale pour bâtir une communauté forte qui aspirera à un développement. Donc, pour moi, cette caravane est une ouverture d’esprit et une inspiration pour la jeunesse et pour la communauté à la culture du vivre ensemble. Elle nous enseigne que la paix est plus forte que tout » a déclaré Mamadou Dian Cissé, Jeune leader de Dabola.
Aissata ONIVOGUI, membre du Club des Jeune Fille Leader de Macenta, raconte : « J'ai vécu les conflits interethniques. C’est quand je quittais le salon de coiffure pour la maison, un jour, j’ai trouvé soudainement que les routes étaient barrées partout. On massacrait et tuait les gens gratuitement. Ils ont décapité un jeune devant moi. Ce jour, heureusement que les gens que j’avais rencontrées étaient de mon ethnie. Donc je suis passée après avoir répondu à leurs questions dans notre langue. Arrivée à la maison, on a passé deux jours sans nourriture puisqu'on ne pouvait pas sortir. On ne mangeait que le riz blanc et de l’eau. J'ai fini par tomber malade. On n’avait pas de soins, mais ce qui était plus malheureux, c’était de voir les jeunes commettre des exactions sur le terrain. La jeunesse, dont des mineurs, était manipulée et utilisée pour se servir des fusils et machettes pour tuer les gens. Tout ceci m'a vraiment bouleversé. Quand il y a eu le calme, en tant que jeune fille leader et humaniste, j’ai mobilisé mes amis du club, malgré qu'il y avait la peur. On a fait des concertations entre nous afin de sortir sensibiliser les jeunes dans nos quartiers, les lieux publics, écoles et dans les familles pour rappeler qu'on est des frères et sœurs, et tous les parents sont nos mamans et papas. Et le vivre ensemble, à travers les messages de paix, est notre patrimoine commun. Personnellement, j'ai participé à cette caravane de cohésion sociale qui est pour moi, une opportunité pour comprendre que nous devons accepter de nous pardonner, surtout nous les jeunes, car la meilleure façon de préserver la paix, est de soutenir le dialogue, cultiver la tolérance et accepter de cohabiter ensemble. Nous devons oublier les messages de haines ...