Non excisée, Hagate loue la sage décision de ses parents
22 octobre 2021
C’est en causant avec ses amies qui éprouvent de sérieuses difficultés dans leurs foyers que Hagate réalise la portée de la noble décision de ses parents.
Hagate Mamy, âgée de 21 ans, est mère d’un enfant et vit dans la commune rurale de Bossou, préfecture de Lola. Elle n’a jamais été excisée, et se sent heureuse dans son foyer. « Mes parents me disent que l’excision n’est pas bonne. Ils ajoutent que la plupart des filles qui y sont passées, ont beaucoup souffert et ont de sérieux problèmes pour avoir des enfants une fois dans leurs foyers », dit-elle.
A l’époque, dans les sociétés africaines, l’excision des jeunes filles était un passage obligé pour leur purification et préservait l’honneur de leurs familles, et même de leurs futurs maris.
A cette croyance, Nina Nahara Esther, la maman de Hagate, n’y a pas échappé à l’âge de 16 ans. Elle raconte avoir subi d’atroces douleurs corporelles et psychologiques lors de son excision. « Quand mon papa m’a envoyée chez ma tante et à ma grande surprise, j’ai été excisée par une vieille. Ce jour, j’ai ressenti d’énormes douleurs qui ont été suivies d’un long moment de saignement. Lorsque je pleurais, certaines femmes tapaient des tonneaux pour dissimuler mes cris. Depuis lors, je n’ai plus eu une santé stable », se souvient Nina Nahara Esther, la maman de Hagate.
Elle ajoute avec regret, que si ses parents étaient en vie, elle leur ferait comprendre le tort qu’ils lui ont causé.
Depuis 2018, l’UNICEF, avec le soutien financier du Comité national suisse, a mis en œuvre à Bossou, un projet dénommé « Lutte contre les Mutilations Génitales Féminines ».
Ce projet vise le changement de comportement de la communauté vis-à-vis des mutilations génitales féminines. Ce changement de comportement devrait se traduire par l’abandon de l’excision. Pour y arriver, une série d’activités a été régulièrement menée sur le terrain. Il s’agit notamment des séances de sensibilisation, des causeries éducatives et des dialogues communautaires.
Ces activités ont même permis de renforcer la conviction de Gbatou Guèmy, le papa de Hagate qui croit fermement que l’excision est aussi une autre voie de transmission du VIH/Sida et d’autres maladies transmises à travers les objets souillés. Toutes choses qui ont fait que Gbatou Guèmy, âgé de 58 ans et son épouse, ont pris la ferme décision de ne pas exciser leurs 4 filles.
« Moi, je n’aime pas cette pratique parce que ce qui se passe là-bas n’est pas encourageant pour la santé des jeunes filles. La plupart des filles excisées, à l’âge adulte ont des problèmes pour concevoir. L’expérience de ma femme qui a eu du mal à avoir des enfants et qui a accouché de nos 4 filles dans d’extrêmes douleurs en est la preuve. C’est pourquoi, ensemble, nous avons décidé de ne pas exciser nos filles », souligne Gbatou Guèmy.
Hagate est reconnaissante pour la noble décision que ses parents ont prise de ne pas les exciser, ses sœurs et elle. « Je remercie infiniment mes parents qui ont pris la décision salutaire de ne pas m’exciser, car en causant avec mes copines excisées, je me rends compte qu’elles rencontrent beaucoup de problèmes dans leurs vies de couple. Je me dis que je me trouverais aujourd’hui dans la même situation, n’eût été la sage décision prise à l’époque par mes parents, de s’opposer à cette pratique autrefois considérée comme une norme sociale à pérenniser et un passage obligé pour toute jeune-fille », nous raconte-t-elle.
Au regard des conséquences préjudiciables de l’excision à la santé de la jeune fille, Nina Nahara Esther sensibilise désormais les membres de sa communauté contre les dangers de l’excision. Elle leur transmet l’espoir d’un avenir meilleur sans l’excision.
A date, et ce, d’après Moriba Zaoro Kolié, Assistant Social à l’Inspection Régionale de l’Action Sociale de l’Enfance, des Droits et Autonomisation des Femmes de la région administrative de N’zérékoré, 80 jeunes-filles non excisées ont été identifiées dans cette commune rurale et placées sous la surveillance des femmes mentors et pères modèle de Bossou.